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Le Caftan dans tout ses Etats

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L’Art de la Broderie de Perles sur Caftan

La broderie à la main sur Caftan se fait sur des motifs du dessin (modèle) en association avec un styliste ou  le  créateur du caftan.

Il existe plusieurs familles de points : les points de croix, de nœuds, linéaires et plats. En haute couture, le point de Lunéville est très utilisé pour la pose de perles, paillettes, plumes, coquillages, rubans et lacets dans le prêt-à-porter de luxe.

Broderie point de Lunéville

Broderie point de Lunéville

A la demande de plusieurs de mes amies, j’écris donc cet article sur la broderie de perles à la main qui donne au caftan une valeur énorme.

La broderie ne concerne pas que le fil puisqu’il s’agit de l’embellissement d’un Caftan. On peut donc broder les perles, des paillettes, des pierres, des Swarovski, du cristal que vous pouvez trouvez chez des artisants à la Médina.

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La pose de perles sur une grande surface de tissu peut être longue et fastidieuse si vous réalisez ce travail à l’aiguille ; c’est pourquoi on effectue généralement ce travail au crochet de Lunéville.
Les brodeuses qui ne connaissent pas cette technique mais ont vu le film « Brodeuses » ou connaissent le travail de l’atelier de M. LESAGE (reportage des Racines et des Ailes) voient de quoi je parle … La pièce est tendue sur un métier et on travaille sur l’envers.
Les fournitures sont chargées sur le fil d’une bobine et posées sur l’envers (sous le métier)…

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J’espère avoir répondu le plus clairement possible à vos questions, mais si ce n’est pas le cas n’hésitez pas à me laisser un message.

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L’Histoire du Caftan

Avant de prendre le Caftan à bras le corps dans son acception actuelle, marocaine et résolument féminine et de vous proposer mes collections, je désirais en comprendre mieux les origines et les codes. Car s’il y a une tradition du Caftan très vivace aujourd’hui et que son fief est le Maroc, le Caftan a une histoire plus vaste qui a transcendé les frontières et les âges.

Certains s’accordent à retrouver jusque dans les manches des empereurs de Chine, l’essence du caftan. En fait, le caftan fut d’abord un habit masculin, particulièrement apprécié des peuples cavaliers de l’Asie centrale. L’habit, ressemblant alors davantage à un manteau ouvert à l’avant, fut adopté par bien des peuples au cours de l’Histoire, y imprimant chacun leurs couleurs et expressions. Les caravaniers qui, pendant des siècles, ont sillonné les contrées d’Asie centrale et de la péninsule arabique reliant l’Orient à l’Occident, transportaient au moins autant de culture dans leurs cargaisons que de coupons de soie et d’épices fines.

ImageCaftan Ouzbek

Je me suis souvent inspirée de l’esprit de ces caftans des premières heures pour mes créations. J’ai retenu les coupes épurées, complètement ouvertes à l’avant et les couleurs franches, mais les ai en revanche appliquées à des voiles brodés et perlés, apportant de la fluidité, de la transparence et surtout de la lumière.

Les traditions perse et ottomane ou le caftan reflet du faste impérial

Si l’Histoire de l’habit est tissée d’influences et confluences culturelles, l’étymologie du mot nous porte, elle, en Perse puis dans l’Empire Ottoman où le « qaftan » sera véritablement sublimé.

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Les Turcs prirent Constantinople en 1453 et quittèrent ainsi leur condition de peuple nomade pour le faste d’un empire qui, à son apogée, s’étendra de l’Algérie au golfe persique et de la mer rouge aux portes de l’Autriche. A l’image de leur épopée, l’habit du peuple des steppes évolua. Le caftan des steppes sobre et pratique pour répondre aux impératifs d’une vie nomade et éprouvante, se para des marques de la puissance et de la richesse du nouvel empire. L’empire perse voisin, héritier d’une tradition millénaire, influencera très sensiblement le goût de son nouveau et opulent voisin. Le caftan, devenu symbole de magnificence et de distinction, nécessitait alors des mois pour être réalisé par les artisans ottomans qui le brodaient, le perlaient et le bordaient de passementeries au fil d’or et d’argent. Ces joyaux devinrent alors naturellement des présents d’honneur à la Sublime Porte. Si bien que l’Académie Française, en digne fille de son temps, définit alors le caftan comme une « robe de distinction en usage chez les Turcs » que « le Grand Seigneur envoie aux personnes qu’il veut honorer ».

Les deux caftans suivants, le premier étant perse, le second ottoman mais tous deux de la même époque, illustrent clairement les similitudes de goût vestimentaire à la cour du Grand Turc et à celle du Shah :

ImageCaftan perse en faille crème brochée en soie polychrome, galonné or,

doublure bordée de taffetas jaune XVIII-XIXème siècle

ImageCaftan ottoman en soie violine motifs végétaux stylisés et sequins, Passementeries

au  fil métallique, Turquie, fin du XVIIIe – début du XIXe siècle

Le caftan d’apparat développé à la cour des empereurs perse et ottoman est le véritable ancêtre du caftan moderne. Les fines étoffes et les riches passementeries au fil d’or, d’argent ou de soie sont les fondamentaux de toutes mes créations, ainsi que la réalisation des caftans entièrement à la main, dans le respect du savoir-faire ancestral des maîtres artisans.

La passion orientale

À la fin du XVIIème siècle, Paris s’entiche de l’univers capiteux du Grand Turc avec la visite forte en couleurs de Soliman Aga à la cour de Louis XIV. Les contes des Mille et Une Nuits traduits en 1704 ouvrent les portes d’un univers exubérant et mystérieux et continue à alimenter, en Europe, la fascination pour la sensualité et les fastes orientaux. Le caftan fait alors fureur entre les dames de l’aristocratie et c’est portant caftan et travaillant à un ouvrage de broderie que la marquise de Pompadour, favorite de Louis XV, pose pour la postérité :

ImageMadame de Pompadour en qualité de sultane

Carle Van Loo, 1750-1754

Voici quelques autres exemples de l’engouement de ces dames pour ce qu’on appelait alors les « turqueries » :

ImageMadame Adelaïde, Princesse de France, en costume turc

Jean-Etienne Liotard, 1753

Jean-Etienne Liotard (1702-1789, portrait de Laura Tarsi en costume turc, Cambridge Fitzwilliam museum

Portrait de Laura TarsiJean-Etienne Liotard,  1741

Le mouvement orientaliste

L’intérêt de l’Occident pour l’esthétique orientale ne se démentira pas au fil des ans, bien au contraire. Ce n’est plus uniquement le voyage d’Italie que les jeunes gens souhaitent faire alors pour parachever leur formation intellectuelle et esthétique, comme c´était le cas à la Renaissance. Le voyage initiatique s’étend désormais jusque sur les rives méridionale et orientale de la Méditerranée. Au XIXème siècle, la colonisation porte le monde oriental au devant de l’actualité. Artistes et écrivains occidentaux tentent l’expérience orientale et s’imprègnent de la culture dont ils nous laissent de vibrants témoignages.

José Tapiró i Baró, peintre espagnol, nous invite, dans cette toile éclatante de couleurs, à participer aux préparatifs de mariage de la fille du chérif de Tanger :

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Les essentiels de les modèles caftans se retrouvent déjà dans ce tableau : le jeu sur les matières notamment via la superposition de riches étoffes brodées et de voilages transparents, les contrastes de couleurs ou encore les rubans et boutons de passementeries qui parcourent les bords des caftans. Mes créations se caractérisent également par le grand soin apporté aux ceintures qui finissent de définir la silhouette féminine. Les ceintures ne sont pas de simples accessoires, mais de véritables parures qui brillent de leur propre éclat tout en sublimant le caftan.

Le caftan marocain, le caftan contemporain

Bien avant que les Turcs ne délogent les Byzantins et donc que l’empire ottoman ne voit le jour, les élites fortes mobiles de l’empire omeyyade qui s’étendit de l’Indus à la péninsule Ibérique et dont les deux cœurs battaient alors à Damas et Cordoue, ont transmis, à partir du IXème siècle, la mode et les goûts orientaux aux cours andalouses. Entre le IXème et le XVème siècle, les émirats arabo-andalous, épris de beauté et de raffinement, ont progressivement donné au caftan une touche particulière.  Le caftan s’enrichit des traditions des peuples variés qui composaient l’Andalousie. Le caftan andalou jouant sur les matières, les superpositions de voilages et les couleurs, se distingua et pris pied au Maroc. Lorsque le dernier royaume mauresque fut défait en 1492, nombre d’artisans andalous traversèrent le détroit de Gibraltar pour s’installer à Fès, Salé, Rabat…L’art andalou rencontra l’esthétique berbère et le caftan trouva des expressions nouvelles au Maroc où depuis il n’a cessé d’évoluer.

ImageFemme de Tanger

Antonio Padrales

C’est dans le terreau riche d’un Maroc à la croisée des mondes, intrinsèquement lié à l’Andalousie mauresque puis au contact direct de l’empire ottoman, que prendra forme la quintessence du caftan tel que nous le connaissons aujourd’hui.

Il y a à peine quelques dizaines d’années, le caftan était l’habit du quotidien comme des grandes heures. Aujourd’hui, les jeunes femmes du Maroc ont troqué pour la plupart le caftan quotidien contre le jean et le tailleur mais pas une n’a abandonné le caftan d’apparat. A la moindre occasion spéciale, les marocaines ne reconnaissent pas de concurrent au caftan, il est cette part de rêve et de sensualité à laquelle nulle ne voudrait renoncer. Le caftan s’est adapté au goût du temps sans en perdre pour autant son âme et il connaît, dans sa déclinaison contemporaine, un engouement renouvelé au Maroc comme au-delà de ses frontières. De grands couturiers dont Yves Saint-Laurent qui collectionnait les caftans ou encore Roberto Cavalli, se sont pris de passion pour cet habit tissé de tradition et de rêve et s’en sont inspirés pour leurs collections. Le caftan a également été mis à l’honneur par des artistes contemporains tel que Fquih Regragui, pour ne citer que lui :

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Vous pouvez découvrir ma collection de Caftan ici